14/03/2019

 

Les Quatre Frantastiques




Cher blogue,


C’est anniversaire en ce moment. L’année dernière, Quentin Bob Mercier, Charles Pennequin et Boris Crack m’ont enlevé dans leur soucoupe. On a pris l’apéro et après on a atterri à la Chambre Blanche, à Québec, pour le mois de la poésie, trois soirées de performances. Moi comme je supportais mal l’atmosphère de la planète Terre, je prenais beaucoup l’apéro et je fumais les herbes de ma planète. La Terre c’est très triste des fois. Mais on a bien rigolé. Le consulat de France nous a accueilli au nom des terriennes et des terriens. Avec une question qui tue. « Est-ce qu’on gagne bien sa vie en poésie ? » Sur nos planètes, il suffit de prendre l’apéro pour gagner sa vie. Il y a que sur terre qu’il faut être assez con pour professionnaliser une activité. Enfin, on n’a rien dit. S’en est suivie une question sur le haïku. Les pains au chocolat étaient bons. On a rencontré Laurent Cauwet aussi, le mec d’Al Dante, lui il prend l’apéro au Mojito il nous a dit, à la fondation Vuitton. C’est comme ça que font les poètes et les poétesses en France il a dit. Alors on a tous levé nos verres à la gloire des puissants. À Rome fait comme les Romains! On s’est un peu poliment fait chier à des lectures au Lieu pis on est retourné à un apéro je pense. C’est mieux les apéros. La poésie, souvent on s’emmerde sur Terre. Mais apparemment ça sert à la classe moyenne éduquée à exprimer plein de trucs que sinon elle peut pas parce que j’ai plus trop compris pourquoi, mais c’est important de se faire chier en se prenant au sérieux en tout cas. Bien important. Sinon ça s’exprime mal.


Quentin Bob, Charles et Boris, ils ont fait plein de trucs de leurs planètes. Moi j’ai tenté un truc dialectique, à la Hegel, je vous laisse juger :




Comme c’est anniversaire j’ai envoyé un message avec les paraboles de l’Institut SETI (Search for Extra-Terrestrial Intelligence) à Quentin Bob, Charles et Boris.



Le radiotéléscope d’Arecibo au nord de l’île de Porto Rico vient tout juste de capter leurs réponses, dans l’ordre ça donne :
 
Charles Pennequin :

Le martien disait : si j’ai
Du goût, ce n’est guère que pour
La terre et le nucléaire Je déjeune toujours, mes frères
Au lance-pierre avec laser
Je broie aussi du trou noir
Mon appétit est guerrier
Mes faims intergalactiques
Je mange de pains atomiques
Et puis dodo : c’est la fin



Boris Crack :

Il n’y a rien dans l’espace
Mais j’y vais quand même
Je n’ai jamais rien compris aux mythes hindous
Mais je connais bie‪n Michel Sardou‬‬‬
Mes voisins l’écoutent souvent
Je devrais m’en sortir avec une tartine de tarama
Et les Lacs du Connemara
Je ne suis pas très musclé
Mais ce n’est pas grave
Les premiers organismes multicellulaires
Etaient de grands rubans à morphologies régulières


Déjà tout petit,
Je cherchais le sens de l’univers
Mais comme on cherche son chien perdu :
« Poil noir, taches blanches, castré »
Personne ne me comprenait, même pas moi
J’étais un vrai mystère
J’étais seul et chétif
J’avançais comme un ver de terre
Dans des trous
Que je creusais moi-même dans le temps
Nous étions dans les années 1980
Nous venions à peine de vous envoyer
Un peu de musique : le Disque d’or
(Parti de la Terre en 1977, l’avez-vous reçu ?)
Nous aurions dû attendre quelques années de plus
Nous aurions alors envoyer ‪Desireless‬ : Voyage, Voyage‬‬
Ou Gala : Free from desire
A l’époque je passais toutes mes journées au lit
J’étais tout le temps malade
Personne ne s’inquiétait de moi
Je ne connaissais personne
La vie, je l’apprenais en regardant Hercule Poirot
A part ça, je n’existais pas, j’étais comme vous

Homo sapiens sapiens
Je porte un slip fluo sur les fesses
Je vous envoie ce message
SMS d’un terrien en détresse
?


Je ne suis plus là
C’est le Big Crunch
Je rentre chez moi
Manger du Crunch


Chers extraterrestres,
Lire ces poèmes changera probablement votre vie
Sauf si vous n’existez pas
Bien cordialement,
Boris

 

Quentin Bob :

voila je crois : On me demande des vers et justement je souhaiterais qu’ils puissent être verts. Oui, couleur verte sur l’écran ou sur le papier, car ils s’agit bien de vers verts. Et même le papier pourrait être d’une nuance verte. C’est qu’en fait je me sens vert, d’une autre dimension, d’une autre planète, un extra-vert à l’intérieur. Je me rappelle des vers d’une poétesse où, si je ne fais pas erreur, il s’agit de quelque chose qui tombe du ciel, quelque chose qui vient du ciel, quelque chose d’extraterrestre qui rentre dans les arbres, qui en ressort ensuite, qui nourrit la terre qui a été nourrit avant par cette énergie verte. Dans une boucle. Une autre boucle là : on peut associer la couleur verte au désagréable, à des pensées boueuses, nauséeuses, nucléaires. Ensuite, on oppose cette masse verte à l’écologie, en passant parfois par un soupçon de green-washing. Car on est très soupçonneux. Et c’est de ça aussi que je voulais parler. On est très soupçonneux et très vert.e.s. C’est en fait de cela que je voulais parler. J’ai cru voir un oiseau vert dans un arbre, un espèce de hibou. C’est ce que je crois. Et l’arbre est vert. Et le pré était vert. Et tout est vert. Et moi aussi. La planète est verte comme un orange. Et ma pomme, moi, et moi je suis tout vert, je me sens vert et tout seul dans mon melon. Sous mon melon ma tête est verte. Je vis une solitude verte, dans un monde qui veut se sentir tout vert, et qui fait la roue, tout le temps, qui se marche sur les pieds, qui marche sur la tête, la tête qui devient rouge comme une tomate. Et je continue de tourner toutes ces pensées dans mon melon, qui est ma tête, quand je me promène en forêt, tous les oiseaux sont verts.

 

Et voilà !
Bisous.

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